Au lendemain de son élection, Nicolas Sarkozy s’empresse de mettre en application son paquet fiscal, très généreux avec les plus aisés. Certaines autres mesures, pourtant annoncées pendant la campagne, trainent en revanche à être mise à exécution. L’une d’entre elle : le glas des parachutes dorés, pourtant annoncé, n’a toujours pas sonné.
Rappel :
« Je veux dire au grand patron dont la gestion est un échec, et qui négocie une prime d’éviction en forme de parachute en or, qu’il est légitime que la réussite paye, mais qu’il est scandaleux que l’échec enrichisse (…).
La moindre des choses, c’est que les dirigeants des grands groupes cotés assument leur rémunération devant leurs salariés, leurs actionnaires, et que, par conséquent, la rémunération de chaque dirigeant ne soit pas secrètement fixée dans le huis-clos du conseil d’administration, mais publiquement approuvée pour chacun d’entre eux par l’assemblée générale des actionnaires et, bien sûr, publiée nominativement dans le rapport annuel. Je propose qu’il en soit de même pour toutes les primes exceptionnelles, les parachutes et les retraites chapeau.
Si je suis élu président de la République, je ferai voter dès l’été 2007 une loi qui interdira la pratique détestable des golden parachutes, parce que c’est contraire aux valeurs qui sont les miennes. »
[Sources(s) : Discours Agen (22/06/06) / Réunion publique Marseille (19/04/07)]
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Plus de 2 ans après ses premières déclarations à ce sujet, on peut lire dans Le Monde du 15 janvier :
Nicolas Sarkozy menace de légiférer sur les « parachutes dorés ».
Le chef de l’Etat, Nicolas Sarkozy, a menacé de légiférer si les recommandations du Medef et de l’Association française des entreprises privées (AFEP), encadrant les rémunérations des dirigeants d’entreprises, ne sont pas appliquées « à la fin du premier trimestre« . « Il faut mettre un terme à des pratiques qui ont suscité, à raison, l’indignation des Français« , a déclaré Nicolas Sarkozy, lors de ses vœux aux forces économiques, jeudi 15 janvier, à Vesoul (Haute-Saône), en faisant allusion aux « parachutes dorés », ces fameuses indemnités de départ versées aux patrons des grandes sociétés cotées. « C’est très simple : soit les recommandations des organisations patronales sont appliquées, et c’est parfait, soit elles ne le sont pas et le gouvernement préparera une loi rendant ces recommandations juridiquement contraignantes« , a-t-il ajouté avant de préciser : « Le rendez-vous, ce n’est pas la fin de cette année, c’est la fin du premier trimestre. »
A ce jour, la plupart des entreprises cotées en Bourse se sont engagées à respecter le code éthique élaboré par l’AFEP et le Medef, à l’invite des pouvoirs publics, afin de mettre fin aux abus du passé. « Au 7 janvier 2009, 94 % des plus fortes capitalisations françaises de la Bourse de Paris ont adhéré à ce code« , a précisé l’Autorité des marchés financiers (AMF), dans un communiqué publié mardi 13 janvier. Mais le gouvernement ne se satisfait pas de ces engagements. Il demande que ces derniers se traduisent dans la pratique, c’est-à-dire que de nouvelles règles de rémunération soient votées sans délai par les conseils d’administration, afin d’être entérinées par les assemblées générales d’actionnaires au printemps. A ce titre, les politiques de rémunération des dirigeants restent souvent opaques et permettent, dans bon nombre d’entreprises, un empilement d’indemnités autorisant des excès. Selon la photographie la plus récente dont on dispose, une étude du cabinet de conseil international Hewitt Associates, datée de novembre 2008, les grandes entreprises ont du chemin à faire pour se mettre en conformité avec les nouvelles normes fixées par le Medef et l’AFEP.
Selon cette étude, qui se fonde sur l’examen des documents de référence des sociétés de 2007 parus en 2008, mais également sur une enquête conduite par Hewitt à l’été 2008, « les pratiques de 80 % des entreprises du SBF 120 [les 120 plus grandes entreprises cotées] ne sont pas conformes aux recommandations de l’AFEP/Medef, qui déconseillent le cumul d’un mandat social et d’un contrat de travail pour les CEO [les dirigeants]« . « Cet empilement d’indemnités, poursuit l’étude, entraîne dans 27 % des cas le plafond de rémunération préconisé par l’AFEP/Medef. »
Bien sûr, cette étude ne préjuge pas des changements que pourront décider les entreprises pour l’année 2009. Elle signifie que les 80 % d’entreprises qui n’étaient pas aux normes en 2008 – soit quatre entreprises sur cinq – vont devoir réformer leurs pratiques. Dans le secret des conseils d’administration, certains dirigeants d’entreprises (Henri de Castries chez AXA, Frédédic Oudéa à la Société générale, Louis Gallois chez EADS, etc.) se seraient déjà engagés à montrer l’exemple. Ils seront jugés sur les faits.
Article : Le Monde 15.01.09 I Illustration © Plantu